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Le Sens des Mots
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LIENS


LE SENS DES MOTS

Ecrivain et ex-libraire à Bécherel, on venait souvent me demander un livre sur l'étymologie des mots européens. Il n'en est guère à part les dictionnaires. J'ai commencé à imaginer mon Etymologie-mythologie, dans l'ordre de mes rencontres (bientôt adresses en lignes de quelques "dictionnaires étymologiques originaux) :
et surtout visiter le site remarquable de NADIA PLA !!!
Pour les mots anglais : http://www.wordfocus.com/vocabulary-resources.html
Agonie
Le mot désigne à l'origine la lutte, dans les Jeux. Il est apparenté à "agôn" qui signifie "assemblée" puis lieu de l'assemblée, et par extension des jeux ; par extension encore, agôn comme agônia désignent la lutte, puis le danger, donc l'angoisse du danger. L'agonie ne désigne donc pas le fait de mourir, mais celui de s'angoisser devant l'approche de la mort, une angoisse née de la lutte et du refus de lâcher prise. En allemand le mot se traduit par Todeskampf ("combat contre la mort") ouTodesangst ("peur de la mort"). En anglais, throe peut signifier "agonie" mais aussi "travail" de l'enfantement. L'étymologie grecque ne s'est transmise que dans les langues latines - agonia signifiant toutefois en latin simplement la "victime sacrée" et les Agonalia étant des fêtes se célébrant en l'honneur de Janus, dieu du passage.

Fanatisme
Vient, du mot fanum, "temple" : le fanatique est en quelque sorte celui qui se cramponne au temple, contrairement au "profane" qui se tient devant (pro) le temple, fait partie de la vie extérieure. Le livre pourrait servir de passerelle de l'un à l'autre, pour peu qu'on en prenne l'esprit et non les "mots d'ordre" (cf. religion)

Idéologie/idéalisme (même mot dans plusieurs langues européennes) :
Les deux mots viennent d'eidon, "image", "représentation", mais aussi "forme" et "beauté, qui a donné le mot "idée" ; les idéologues sont une invention récente et révolutionnaire - dressant à la manière totalitaire son "catalogue des idées", sa "grille" d'interprétation, alors que l'idéalisme est né de la notion religieuse, chevaleresque et philosophique de l'idéal, parente du concept originel de beauté. 

On forge une idéologie, on tend vers ou l'on rêve d'un idéal. L'une sort toute armée du cerveau (d'un idéologue), l'autre s'élabore, comme une vision de l'esprit à laquelle les sens n'ont pas accès - ce que Balzac appelait "la mystérieuse fleur de l'Idéal". L'idéal nous entraîne, l'idéologie nous enchaîne, nous soumet à sa loi : elle a des obligations de résultat. L'idéaliste sait, lui, que son combat n'a pas de but réalisable en ce monde

Il est intéressant de voir que notre mot "idée" couvre en grec ancien plusieurs acception : ce peut-être la doxa, l'opinion, l'ennoia ou la dianoia, l'intelligence ou exercice de réflexion - et quelques autres composés de noos ou noûs, la pensée, l'exercice de penser. On découvre ainsi à quel point le grec, langue imagée et précise grâce à ses composés, s'est révélée avec l'allemand (langue elle-aussi de préfixes et suffixes) un instrument irremplaçable d'exploration philosophique.

Idiot/imbécile
Si l'on vous traite d'idiot ou d'imbécile, ce n'est pas du tout la même chose ! L'imbécile, imbecillus, c'est le faible, la terre stérile, celui qui n'a pas de caractère ; alors que l'idiot, idiotès, c'est l'individu, le simple particulier (opposé à l'Etat), l'homme du privé, qui, à force de s'isoler, d'être enfermé dans sa petite sphère, d'individualisme à outrance, en devient ignare et stupide - qui ne préférerait être traité d'idiot plutôt que d'imbécile ?

Pervers
Le pervers (perversus) est celui qui fait tout sens dessus dessous, détourne le sens des choses et prend les mots au contre-pied de la lettre.

Porno
La pornè était dans l'antiquité la femme de mauvaise vie qui vendait ses charmes. On l'appelait naguère aussi "péripatéticienne", la promeneuse, nom appliqué d'abord aux philosophes comme Aristote qui philosophaient en marchant (peripatètikos).

Religion
On pourrait dire que c'est l'invention qui fit l'homme humain - pour le meilleur et pour le pire. Qui le relia aux autres, à travers l'écrit, le Biblon, le "Livre". L'écrit abolissait une part de Mystère (ce qui est clos, silencieux), sortait de la version sybilline, des clameurs et chuchotements, pour s'occuper de chaque homme au sein d'une communauté. Foin de l'oral et des rumeurs, laissés aux bardes, aux chantres et aux poètes qui en firent des légendes et des contes. Foin même du lapidaire le bien nommé, du hiéroglyphe réservé aux hiéroi - dépositaires du sacré. Début de la Loi écrite accessible à tous, pour peu que l'on puisse lire, imposant cadre et parapets, c'est-à-dire le respect de l'autre (rappelons Camus "On n'est libre qu'aux dépens de l'autre"). Puis la Bonne Nouvelle (Evangile, en grec) rendit à Dieu ce qui était à Dieu, à César ce qui était à César, prémisses de la laïcité, où chacun peut "se relier" (relegere) aux autres et à la société selon le mode qu'il choisit, pourvu qu'il ne l'impose pas à tous. Puis la Soumission (Coran) qui proclame que l'on "entre au paradis sur les pas des Mères". Presque immédiatement, quand la lettre estompa l'esprit, naquit le fanatisme, contraire de la religion dans la mesure où il favorise l'esprit sectaire celui qui "coupe" (secare), qui isole des autres.
A compléter par la page du magazine en ligne ASPASIE

(à suivre)

Archives : FELG 2005, FELG 2006 :

Dans le Nouveau Monde, comme en Europe centrale – où le latin se parle entre peuples de langue différente dans certains milieux -, le latin n’a jamais été si vivant, en particulier sur Internet. Deux radios, l'une allemande, l'autre finlandaise, présentente les nouvelles en latin. Les blagues anti-communistes des pays de l'Est se déclinent dans la langue de Cicéron. Et le latin est restée ou redevenue la lingua franca de certaines professions.

Quant à la Grèce, après la finale de l’Euro 2004 contre Lisbonne, les journaux ne reprirent-ils pas en chœur le vieux mot lancé en 490 av. J-C par Philippides après la victoire de Marathon (sur les Perses) : Nenikekamen, « nous avons gagné ! ».

Européennes et vivantes sont ces deux langues qui nous permettent de nous comprendre entre peuples qui disent « porte » (du latin porta) et peuples qui disent « door » ou « Tür » (du grec thyra). Entre ceux qui disent l'Amour en parlant sentiments ("Aimer") ou en portant l'accent sur le plaisir ("Lieben" ou "to Love") Deux langues, racines de nos mythes et de nos rêves, de nos valeurs d’utopie (ce lieu qui selon l’étymologie grecque n’existe pas et que nonobstant nous voulons toujours atteindre) ou de conquête (notre « quête commune »), les langues-mères de l’Europe des cultures.